En 1985, après des années de frustration passées à consulter les docteurs dans les cliniques de toute l’Angleterre, Margaret Cornes était assise dans le bureau d’un médecin réputé d’un âge avancé avec un jeune interne dans un hôpital londonien. Ils venaient de lui annoncer que sa fille Jessica, de huit ans, souffrait de crises partielles complexes d’épilepsie, probablement causées par une encéphalite. Soulagée d’avoir obtenu enfin une réponse, Margaret Cornes s’est sentie du même coup accablée en apprenant qu’il n’existait pas de traitement pour les terribles crises de Jessica.
Elle a demandé s’il y existait un autre endroit dans le monde où emmener sa fille ou des experts qui en sauraient plus sur la question. Le médecin âgé lui a répondu qu’il n’y en avait malheureusement pas.
En quittant l’hôpital, défaite à l’idée qu’il n’y avait aucune issue, elle a entendu qu’on l’appelait par son nom. C’était le jeune médecin. « Madame Cornes! », criait ce dernier en courant dans le couloir pour la rejoindre. « Ce n’est pas vrai – il existe un endroit où vous pouvez emmener Jessica, à Montréal, au Canada ».
C’était la première fois que Margaret Cornes entendait parler de l’Institut-Hôpital neurologique de Montréal, mais cela allait changer leur vie pour toujours.
Le voyage au Canada
En 1986, elle a accompagné Jessica à Montréal pour la faire examiner par le Dr Fred Andermann, neurologue de renom, et directeur de l’unité d’épilepsie et de la clinique d’épilepsie au Neuro durant 35 ans.
« Le Dr Andermann connaissait tout le monde par son prénom, son travail et son origine, ce qui n’était pas du tout le cas en Angleterre, car la culture au Canada était radicalement différente », dit Margaret Cornes.
Pendant le mois précédant l’opération, où Jessica passait des tests, le Dr Andermann s’est particulièrement intéressé à toutes les observations de Margaret sur Jessica. Il notait tout avec sérieux jusqu’aux détails insolites qui semblaient déclencher les crises, comme le fait de marcher dans une rue étroite encadrée de grands immeubles. Ce type de constatation avait été rejeté du revers de la main par d’autres médecins et Margaret Cornes demandait s’il était bien utile de les communiquer. « Madame Cornes », répondait gentiment le Dr Andermann, personne ne connait votre enfant mieux que vous, les mères savent bien des choses ».
Margaret Cornes se souvient absolument de tout durant leur séjour montréalais, y compris de la chambre d’hôpital qu’elles partageaient avec une petite fille de 18 mois, Marie-Ève, qui devait aussi subir une intervention chirurgicale pour traiter l’épilepsie. Même si elle parlait très peu le français et que la mère de Marie-Ève ne parlait pratiquement pas l’anglais, elles ont vécu ensemble une expérience forte, depuis les tests préopératoires difficiles qui provoquaient des crises jusqu’aux premiers jours terribles suivant l’intervention. Margaret Cornes conserve de cette mère le souvenir d’une femme en détresse, mais reconnaissante d’avoir un établissement de renommée mondiale dans sa propre ville. Elle se remémore ses paroles : « Que cet hôpital soit béni. »
L’opération qui change la vie
L’intervention de Jessica a été un succès et elles sont retournées à trois reprises à Montréal, une fois pour une autre opération et deux fois pour des examens de suivi.
Lors de l’une de ces visites, Margaret Cornes et sa fille attendaient dans la salle avant leur rendez-vous lorsqu’elles ont vu une petite courir dans le corridor. Margaret a su immédiatement qu’il s’agissait de Marie-Ève. Les deux mères se sont saluées comme des membres d’une même famille. « Cette maman était complètement transformée », dit Margaret. « C’était une jeune femme normale avec une fillette qui courait dans le couloir. Pouvez-vous croire que nous nous sommes rencontrées? De tous les jours où nous étions là? C’était réellement invraisemblable. »
Pour Margaret, l’opération de Jessica s’est avérée miraculeuse. Elle est passée de plusieurs crises par jour à une crise tous les quelques mois, et celles-ci ont de plus diminué au fil du temps. « Sans le Neuro, nous aurions perdu Jessica, car ses terribles crises faisaient des ravages. Elle a radicalement changé et a pu mener désormais une vie autonome. » À l’heure actuelle, Jessica a 47 ans.
« Même après presque 40 ans, tous les jours, je pense encore à ce que le Neuro a fait pour notre famille », déclare Margaret Cornes. « Quand on ressent autant d’estime pour quelque chose que j’en ai pour le Neuro, cela reste gravé dans votre mémoire pour toujours ».