Depuis longtemps associées à la maladie d’Alzheimer, les protéines bêta-amyloïde et tau protéines, entraînent par leur accumulation pathologique le déclin cognitif des personnes atteintes. Toutefois, la manière dont se déroule ce processus reste mal comprise.
Lors d’une nouvelle étude menée dans les laboratoires de Sylvain Baillet au Neuro et de Sylvia Villeneuve au Centre de recherche Douglas, on est parvenu à élucider la façon dont ces protéines influent sur l’activité cérébrale et contribuent probablement au déclin cognitif.
L’équipe dirigée par Jonathan Gallego Rudolf, doctorant dans les laboratoires de Sylvain Baillet et de Sylvia Villeneuve, a recruté 104 personnes présentant des antécédents familiaux de maladie d’Alzheimer. Ils ont examiné le cerveau des participants en associant deux technologies : la tomographie par émission de positons (TEP), pour détecter la présence des protéines et leur localisation, et la magnétoencéphalographie (MEG) pour enregistrer l’activité cérébrale dans ces régions.
En comparant les résultats de ces deux examens, les scientifiques ont constaté que les zones du cerveau qui présentaient des taux élevés de bêta-amyloïde montraient des expressions macroscopiques d’hyperactivité cérébrale, détectables par une augmentation du fonctionnement cérébral à fréquence rapide et une diminution du fonctionnement à fréquence lente. Chez les personnes dont le cerveau contient à la fois des protéines bêta-amyloïde et tau, le schéma s’oriente vers l’hypoactivité, la progression de la pathologie entraînant un ralentissement de l’activité cérébrale.
En utilisant des tests cognitifs réalisés environ quatre ans après les scanners cérébraux, l’équipe a découvert que les participants présentant des taux supérieurs d’amyloïde et de tau, associés au ralentissement cérébral, montraient un déclin plus marqué de l’attention et de la mémoire.
De tels résultats laissent penser que l’interaction entre les protéines bêta-amyloïde et tau entraîne une altération du fonctionnement cérébral avant même l’apparition de symptômes cognitifs perceptibles. Au cours d’une étude de suivi, Jonathan Gallego Rudolf prévoit d’examiner à nouveau les mêmes participants, au fil du temps, afin de vérifier si l’accumulation des deux protéines intensifie le ralentissement de l’activité cérébrale et si cela permet de prédire avec précision l’évolution cognitive des participants.
« Notre étude fournit des preuves directes du changement présumé de l’activité neurophysiologique, de l’hyperactivité neuronale à l’hypoactivité, et de son association avec un déclin cognitif longitudinal chez l’homme. Ces résultats, qui corroborent ceux des modèles animaux et informatiques, font progresser notre compréhension des mécanismes pathologiques qui sous-tendent le stade préclinique de la maladie d’Alzheimer », précise Jonathan Gallego Rudolf.
Les résultats de l’étude ont été publiés le 18 septembre 2024 dans un article de la revue Nature Neuroscience intitulé « Synergistic association of Aβ and tau pathology with cortical neurophysiology and cognitive decline in asymptomatic older adults ».