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Logement d’abord : un modèle rentable, surtout auprès des sans-abri les plus vulnérables

Il s’avère encore plus avantageux de trouver un logement aux sans-abri atteints de troubles mentaux graves qu’à des personnes ayant des besoins modérés
Publié: 25 August 2020

L’itinérance coûte cher aux Canadiens, mais l’argent dépensé pourrait être beaucoup mieux investi. D’après une nouvelle analyse dirigée par des chercheurs de l’Université McGill, il est financièrement plus avantageux de trouver un logement stable aux sans-abri vivant avec des troubles mentaux graves qu’à ceux qui ont des besoins modérés. Une stratégie axée sur l’accès à un logement permanent pour ces personnes génère des économies équivalant environ aux deux tiers de son coût.

Selon le modèle Logement d’abord, on commence par trouver un logement à une personne en situation d’itinérance, pour ensuite fournir à cette dernière le soutien et les services supplémentaires dont elle a besoin. Des recherches avaient déjà mis en lumière l’efficacité de Logement d’abord comme outil aidant les sans-abri à trouver un logement et à le garder. Cette nouvelle étude, publiée dans Psychiatric Services, renferme une évaluation exhaustive du rapport coût-efficacité de ce modèle appliqué aux sans-abri vivant avec des troubles mentaux graves.

Au Canada, les coûts annuels que doit assumer la société pour des personnes en situation d’itinérance et aux prises avec une maladie mentale grave s’élèvent à environ 75 000 $, comparativement à 51 000 $ pour les sans-abri ayant des besoins modérés. Ces coûts sont souvent associés aux soins de santé, aux refuges d’urgence et aux services de police.

« Bien que les gouvernements provinciaux aient consenti à soutenir le programme Logement d’abord pour les personnes ayant des besoins modérés, moyennant un financement du fédéral, peu d’entre eux se sont montrés prêts à puiser dans leur propre budget pour en faire autant pour les personnes ayant des besoins importants et vivant avec des troubles mentaux graves », déclare Eric Latimer, auteur principal de l’étude, professeur au Département de psychiatrie de l’Université McGill et chercheur au Centre de recherche Douglas. « Dans leur planification de la période postpandémie, les gouvernements provinciaux auraient tout intérêt à prévoir plus d’investissements dans les programmes Logement d’abord pour aider ce groupe très vulnérable à trouver une solution de logement permanente. »

En s’intéressant à cinq villes canadiennes, soit Moncton, Montréal, Toronto, Winnipeg et Vancouver, les chercheurs ont constaté que l’aide apportée aux personnes ayant des besoins importants par l’intermédiaire du modèle Logement d’abord était très rentable.

Le modèle Logement d’abord

Alors que les services classiques proposent une transition vers un logement stable sur une période plus ou moins longue, le modèle Logement d’abord prévoit des subventions au loyer et des services de soutien grâce auxquels les participants peuvent accéder à un logement sans tarder, habituellement dans un appartement ordinaire sur le marché locatif privé. Tout est mis en œuvre pour éviter un retour à une situation d’itinérance.

Vers une réduction du coût de l’itinérance

Selon les chercheurs, investir dans le modèle Logement d’abord pour les sans-abri atteints de troubles mentaux graves est la façon la plus judicieuse d’utiliser les deniers publics, limités, destinés à aider ces personnes à trouver et à conserver un logement permanent.

La majeure partie des coûts associés au modèle Logement d’abord pour les personnes atteintes de troubles mentaux graves est compensée par des économies dans d’autres services qu’utilisent les personnes en situation d’itinérance, notamment les refuges d’urgence. On observe une réduction de 69 % des coûts d’intervention, qui passent de 20 000 $ à 6 300 $ par personne par année. Pour les personnes ayant des besoins modérés, les coûts d’intervention sont moindres, se chiffrant à environ 14 500 $, et les économies réalisées sont plus faibles (46 %). Le coût net est donc de 7 900 $ par personne. Un logement stable coûte environ 42 $ par jour pour une personne aux besoins importants, comparativement à 56 $ par jour pour une personne ayant des besoins modérés. Dans les deux cas, le coût du modèle Logement d’abord est comparable à celui de bon nombre d’autres programmes d’accès au logement que les gouvernements provinciaux financent déjà, et il procure un logement stable plutôt que temporaire.

« Nous savions déjà que le modèle Logement d’abord était une solution rentable pour les personnes ayant des besoins modérés. Nous savons maintenant qu’en l’appliquant aux sans-abri ayant des besoins importants, nous réaliserons des économies encore plus importantes. La réduction des coûts associés aux refuges, aux visites médicales et aux incarcérations fait de ce modèle une stratégie plus payante si on l’utilise auprès de cette population », ajoute le Pr Latimer.

L’étude

L’article « Cost-Effectiveness of Housing First With Assertive Community Treatment: Results From the Canadian At Home/Chez Soi Trial », par Eric A. Latimer, Daniel Rabouin, Zhirong Cao, Angela Ly, Guido Powell, Tim Aubry, Jino Distasio, Stephen W. Hwang, Julian M. Somers, Ahmed M. Bayoumi, Craig Mitton, Erica E. M. Moodie et Paula N. Goering, a été publié dans la revue Psychiatric Services.

DOI : https://doi.org/10.1176/appi.ps.202000029

L’Université McGill

Fondée en 1821, à Montréal, au Québec, l’Université McGill figure au premier rang des universités canadiennes offrant des programmes de médecine et de doctorat. Année après année, elle se classe parmi les meilleures universités au Canada et dans le monde. Établissement d’enseignement supérieur renommé partout dans le monde, l’Université McGill exerce ses activités de recherche dans deux campus, 11 facultés et 13 écoles professionnelles; elle compte 300 programmes d’études et au-delà de 40 000 étudiants, dont plus de 10 200 aux cycles supérieurs.Elle accueille des étudiants originaires de plus de 150 pays, ses 12 800 étudiants internationaux représentant 31 % de sa population étudiante. Au-delà de la moitié des étudiants de l’Université McGill ont une langue maternelle autre que l’anglais, et environ 19 % sont francophones.

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