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Les oiseaux chanteurs et notre mode d'apprentissage

Des chercheurs de l’Université McGill découvrent le rôle important d'une zone du cerveau dans l’apprentissage vocal chez toutes les espèces
Publié: 8 April 2014

Lorsque vous exécutez un mauvais lancer ou chantez faux, les noyaux gris centraux de votre cerveau en sont peut-être les coupables. Ces masses de substance grise situées dans la profondeur des hémisphères cérébraux participent au contrôle de la motricité et à l’apprentissage. Votre lancer erratique ou votre fausse note pourrait donc être attribuable au fait que votre cerveau vous a incité à modifier votre comportement afin de vous aider à apprendre, par essais et erreurs, à mieux performer.

Mais comment le cerveau peut-il vous pousser à modifier votre comportement?

En compagnie de chercheurs de l’Université de la Californie (San Francisco), de l’Institut des sciences de l’Éducation et de la recherche, et de l’Université Duke, la professeure Sarah Woolley, de l’Université McGill, a étudié cette question chez l’oiseau chanteur, qui apprend le chant au cours de son don développement de la même façon que se fait l’apprentissage du langage chez l’humain. L’oiseau chanteur mémorise notamment le chant de son père ou de son tuteur, puis le répète jusqu’à ce qu’il le reproduise de façon similaire.

« Une fois adulte, il continue d’interpréter ce chant, mais il est intéressant de constater qu’il le fait de façon légèrement différente », précise la professeure Woolley. « Cette variabilité ne constitue pas un défaut ni ne signifie qu’il ne peut produire une meilleure version du chant original, car il en est capable ‒ particulièrement lorsqu’il tente de séduire une femelle. Alors lorsqu’il chante seul et module son chant, c’est qu’il le fait délibérément. »  

Les chercheurs se sont appuyés sur cette variabilité du chant pour examiner la modulation de l’activité de cellules individuelles dans diverses parties du cerveau en fonction de l’environnement social.

« Nous avons découvert que la modulation sociale de la variabilité provenait des noyaux gris centraux, une région du cerveau qui joue un rôle important dans l’apprentissage et la production de mouvements, non seulement chez l’oiseau, mais aussi chez les mammifères, dont l’homme », précise la professeure Woolley. « Ces observations nous indiquent que les noyaux gris centraux pourraient se révéler déterminants  dans relativement à l’apprentissage moteur chez toutes les espèces en raison de leur activité génératrice de variabilité. »

Les chercheurs ont étudié l’oiseau chanteur, car celui-ci est doté d’un circuit corticobasal des noyaux gris centraux propre au chant. En revanche, pour la plupart des comportements observés chez les autres espèces, les cellules et circuits corticobasaux des noyaux gris centraux qui interviennent dans certains comportements, comme l’apprentissage de la marche, pourraient se trouver à proximité des cellules et circuits qui jouent un rôle important dans d’autres comportements ou même s’y trouver intégrés. « L’évolution, chez l’oiseau chanteur, d’un circuit identifiable intervenant dans un seul comportement complexe nous donne un avantage considérable lorsque nous tentons de déterminer le rôle exact de ces régions du cerveau et la façon dont elles remplissent ce rôle », explique la professeure Woolley.

Le rôle des noyaux gris centraux dans la maladie de Parkinson

Les noyaux gris centraux sont gravement atteints en présence de certaines affections, dont la maladie de Parkinson et la chorée de Huntington. Les résultats obtenus par l’équipe de chercheurs pourraient permettre de comprendre les changements qui surviennent au chapitre de l’apprentissage et de la souplesse des mouvements chez les personnes atteintes de ces maladies.

« Voilà le genre de questions auxquelles nous tentons maintenant de répondre dans notre laboratoire : comment la variabilité est-elle modifiée lorsque nous manipulons radicalement le système, comme cela se produit en présence de certaines maladies? », conclut la professeure Woolley. 

Laboratoire de la professeure Woolley : http://sarahwoolleylab.wordpress.com/

Pour consulter l’article Emergence of context-dependent variability across a basal ganglia network publié dans Neuron : http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0896627314000701

CRÉDIT PHOTO : THINKSTOCK

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