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Une étude révèle que les préjugés sexistes freinent les femmes chirurgiennes

Instruments inadaptés, doutes sur leurs compétences : le milieu chirurgical marginalise les femmes, selon une étude inédite au Canada
Publié: 10 July 2025

Les femmes représentent aujourd’hui plus de la moitié de la population étudiante en médecine au Canada, mais seulement un tiers des chirurgiens en exercice. Une nouvelle étude donne à penser qu’une partie de cet écart est attribuable aux normes de genre ancrées dans la culture du milieu de travail. L’équipe de recherche de l’Université McGill affirme que des préjugés subtils mais persistants pourraient pousser les femmes à quitter ce domaine.

« De nombreuses études sur l’écart entre les genres en chirurgie sont axées sur l’augmentation du nombre de femmes, mais peu d’entre elles portent sur ce que les femmes ressentent réellement au quotidien », explique l’autrice principale, la Dre Jillian Schneidman, qui a obtenu son diplôme en médecine à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université McGill cette année.

Pour combler cette lacune, la Dre Schneidman a mené la première étude ethnographique sur les femmes en chirurgie au Canada. Publiée dans The American Journal of Surgery, l’étude s’appuie sur 67 heures d’observation en salle d’opération et des entrevues approfondies avec des chirurgiennes travaillant dans un hôpital universitaire au Canada.

Les résultats montrent que le monde de la chirurgie reste façonné par une norme masculine qui touche tous les aspects de la profession, de l’attribution des cas complexes à la conception même des instruments. Si l’on évoque souvent la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale comme un obstacle pour les femmes, la Dre Schneidman estime que le problème de fond est structurel.

« Le statut des femmes en chirurgie fait l’objet d’un questionnement constant, et il est souvent discrédité », soutient Jillian Schneidman, qui a réalisé cette étude dans le cadre de sa maîtrise en anthropologie médicale à l’Université Oxford.

Les participantes ont rapporté avoir été écartées de certaines références chirurgicales et moins bien rémunérées pour des interventions comparables, et avoir dû utiliser des instruments mal adaptés à la taille de leurs mains. Selon Jillian Schneidman, une chirurgienne a même choisi sa spécialité parce que les instruments utilisés dans un autre domaine étaient trop grands pour ses mains.

La Dre Schneidman a observé que le genre influençait le milieu chirurgical à trois niveaux. Sur le plan organisationnel, les femmes étaient écartées des références médicales, bénéficiaient de moins de temps en salle d’opération, étaient moins bien rémunérées et étaient souvent perçues comme des chirurgiens moins légitimes. Sur le plan individuel, elles subissaient une pression constante pour faire preuve de confiance en elles et d’assertivité, sans toutefois en faire trop, de peur d’être perçues comme « peu féminines ». Enfin, sur le plan physique, les espaces et les instruments chirurgicaux étaient pensés pour des hommes : dans une salle d’opération, une affiche précisait même que le couvre-chef obligatoire était un « chapeau pour hommes ».

Elle souligne que la culture chirurgicale n’est pas seulement une question d’équité, mais aussi de soins aux patients.

« Des équipes de soins diversifiées reflètent mieux la diversité de la population traitée », souligne-t-elle, en citant des études récentes qui associent la présence de femmes chirurgiennes et une plus grande diversité au sein des équipes à de meilleurs résultats pour les patients.

La Dre Schneidman entame sa résidence en chirurgie générale à l’Université McGill. Elle indique que sa prochaine étude portera sur la manière dont les femmes chirurgiennes font face à l’exclusion structurelle, notamment sur les stratégies qu’elles adoptent pour minimiser ou intérioriser les préjugés afin de réussir.

L’étude

L’article « Women in surgery: The social construction of gender in surgical practice », par Jillian Schneidman, Kathleen Rice et Neil Armstrong, a été publié dans The American Journal of Surgery

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