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Des virus anciens présents dans notre ADN détiendraient-ils la clé de notre humanité?

Une nouvelle méthode d’examen de l’ADN viral conduit à la mise au jour de séquences cachées au possible potentiel régulateur, d’où la nécessité de réexaminer le génome humain 25 ans après sa première cartographie
Publié: 21 July 2025

Selon une étude internationale récente, des fragments d’ADN viral ancien autrefois considérés comme des « déchets » pourraient, en fait, jouer un rôle dans la régulation de nos gènes.

À l’aide d’une méthode novatrice permettant de retracer l’histoire évolutive de l’ADN viral, des chercheurs de l’Université McGill et de l’Université de Kyoto ont découvert des séquences jusqu’alors négligées dans les annotations génomiques.

« Si nous parvenons à déterminer clairement quelles parties de notre génome sont propres à l’être humain ou aux primates, et lesquelles proviennent de virus, nous ferons un pas de plus vers la compréhension de ce qui fait notre humanité, et de l’influence de l’ADN sur notre état de santé et sur l’apparition de maladies », explique Guillaume Bourque, l’un des auteurs principaux de l’étude, professeur au Département de génétique humaine de l’Université McGill.

Environ 8 % du génome humain provient de virus qui ont infecté nos ancêtres il y a de cela des millions d’années. Si on considérait autrefois ces séquences comme inutiles, on sait aujourd’hui que certaines d’entre elles interviennent dans l’activation et la désactivation de gènes. La nouvelle étude, dans laquelle sont mises au jour des séquences précises au potentiel régulateur, vient s’ajouter aux données probantes de plus en plus nombreuses selon lesquelles ces séquences longtemps négligées pourraient jouer un rôle important et devraient donc être étudiées de plus près.

Une nouvelle méthode pour décoder l’ADN viral

Lors du séquençage du génome humain, il y a 25 ans, les chercheurs ont bel et bien repéré l’ADN viral, mais ils ne disposaient pas des outils nécessaires pour l’étudier en détail. L’équipe a donc réexaminé le génome à l’aide de techniques modernes et constaté que de nombreuses annotations étaient obsolètes ou incorrectes.

Les scientifiques ont donc mis au point une nouvelle méthode permettant de regrouper les séquences virales en fonction de leur histoire évolutive, plutôt qu’uniquement en fonction de leur similitude. En retraçant l’évolution des séquences au fil du temps, ils ont observé des schémas qui laissent entrevoir lesquelles pourraient agir sur l’activation et la désactivation des gènes.

Ainsi, dans une famille d’ADN viral appelée « MER11 », l’équipe a découvert qu’il n’existait pas trois sous-types, comme on le pensait auparavant, mais bien quatre. L’un de ces sous-types, le MER11_G4, particulièrement actif dans les cellules souches humaines, comportait un motif d’ADN particulier présent uniquement chez l’être humain et le chimpanzé. C’est ce groupe qui, selon l’équipe de recherche, pourrait jouer un rôle dans l’activation et la désactivation des gènes.

« L’annotation actuelle de l’ADN viral dans le génome ne doit pas être considérée comme définitive. Il est temps de la revoir et de l’affiner », déclare Guillaume Bourque.

Une meilleure compréhension du génome, ajoute-t-il, pourrait aider les scientifiques à comprendre des mutations génétiques liées au cancer et à des maladies rares.

L’étude

L’article « A phylogenetic approach uncovers cryptic endogenous retrovirus subfamilies in the primate lineage », par Xun Chen, Zicong Zhang, Yizhi Yan, Clément Goubert, Guillaume Bourque et Fumitaka Inoue, a été publié le 18 juillet dans la revue Science Advances.

L’étude a été financée par les Instituts de recherche en santé du Canada, le programme des Chaires de recherche du Canada, le Fonds de recherche du Québec – Santé et le programme japonais World Premier International Research Center Initiative.

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