Les sites de dépôt à neige et les décharges inactives figurent parmi les principales sources d’émissions de méthane à Montréal
Les émissions de méthane (CH₄) à Montréal sont réparties de manière inégale sur l’île, les concentrations les plus élevées se trouvant dans l’est. Parmi les pires pollueurs figure le plus grand dépôt à neige de la ville, qui émet des niveaux de méthane comparables à ceux des décharges actuelles et anciennes de la ville, ainsi que des fuites de gaz naturel.
Les scientifiques ont recensé plus de 3 000 points névralgiques de méthane au cours de leur enquête de surveillance mobile menée sur quatre ans. L’équipe soutient que ce nombre était inférieur à celui d’autres villes de densité comparable, mais qu’il fallait néanmoins mettre fin à ces émissions importantes.
Bien que le méthane soit beaucoup moins présent dans l’atmosphère que le dioxyde de carbone (CO₂), chaque molécule de méthane retient environ 32 fois plus de chaleur qu’une molécule de CO₂ », explique Peter Douglas, professeur agrégé au Département des sciences de la Terre et des planètes et coauteur de l’étude. « Pour remédier au problème, nous devons savoir d’où proviennent ces émissions. »
La gestion des déchets, les infrastructures et le déneigement sous la loupe
Comme la plupart des villes, Montréal publie un inventaire annuel des émissions, mais les données qui y figurent ne sont que des estimations. Cette enquête de surveillance mobile visait à recueillir des données fiables afin d’aider le Québec à atteindre son objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 37,5 % d’ici 2030.
Les décharges inactives, y compris les projets de rénovation urbaine comme le parc Frédéric-Back, illustré ci-dessus, ont produit le plus d’émissions. Mais les scientifiques ont été surpris de découvrir que la carrière Francon, le plus grand site de dépôt à neige de Montréal, émet du méthane à un niveau comparable.
« Ce site est aussi vaste que certaines autres décharges. On y déverse des tonnes de déchets ramassés sur les routes », dit le professeur Douglas. Lorsque la neige fond, elle forme un lac susceptible d’abriter des microbes capables de libérer davantage de méthane.
Les concentrations de méthane les plus élevées ont été observées dans l’est de la ville, qui, en plus d’abriter de nombreuses anciennes décharges, est un endroit où les fuites de gaz naturel sont plus fréquentes.
« La plupart des fuites de gaz sont concentrées là où les infrastructures sont plus anciennes », explique le professeur Douglas. « Mais notre attention s’est surtout portée sur la densité de population : plus il y a de gens, plus il y a de conduites de gaz naturel et plus il y a de fuites. »
La méthodologie
Les scientifiques ont mené des enquêtes mobiles pendant quatre ans (en 2019 et de 2022 à 2024) sur 3 300 kilomètres carrés de la ville et sur des sites clés hors de l’île, comme le site d’enfouissement de Sainte-Sophie. Des échantillons d’air ont été prélevés à l’aide d’un appareil qui mesurait les niveaux de dioxyde de carbone et de méthane toutes les secondes.
Trois itinéraires fixes, deux dans des zones densément peuplées et un près du canal Lachine, ont été étudiés chaque semaine pendant 10 semaines. Ces enquêtes répétées ont aidé les chercheurs à suivre l’évolution des émissions de méthane au fil du temps, révélant ainsi les points névralgiques persistants et ceux de courte durée.
« Nous avons observé une hausse de la concentration, suivie d’une baisse, ce qui nous a permis d’estimer approximativement la quantité de gaz émise par une source et d’en localiser l’origine, en particulier lorsque nous disposions de données sur le vent pour nous aider à trianguler l’emplacement », explique le professeur Douglas.
Environnement et Changement climatique Canada a effectué la plupart des tests en voiture. Le service local de vélos en libre-service BIXI a également offert des abonnements gratuits aux scientifiques pour les aider dans leur travail.
Le projet en cours permettra bientôt de suivre les changements saisonniers des concentrations de méthane et d’étudier le rôle atténuant des bactéries de surface dans les décharges.
L’étude
L’article « Four years of mobile monitoring show that urban waste is the primary source of large methane emissions hotspots in Montreal, Canada », par Regina Gonzalez Moguel, Peter M. J. Douglas, Jacob Asomaning, Emilie Reid, Djordje Romanic, Felix Vogel, Sebastien Ars, Lawson Gillespie et Yi Huang, a été publié le 4 septembre 2025 dans Environmental Research Communications. L’étude a été financée par Environnement et Changement climatique Canada.