Habiletés de lecture : des étudiantes et une professeure de l’ÉSCH se penchent sur l’écart entre les sexes

En matière d’alphabétisation, au fil des époques et d’une culture à l’autre, une tendance s’est dessinée chez les enfants : souvent, les garçons lisent moins bien. Les filles sont-elles réellement de meilleures lectrices que les garçons? Et, si c’est le cas, quelle est la cause de cette inégalité? Susan Rvachew, Ph. D., de l’École des sciences de la communication humaine (ÉSCH), a dirigé un séminaire ayant pour but d’étudier le phénomène. Quatre étudiantes de deuxième année à la maîtrise en orthophonie – Hope Anderson, Rebecca Nishimura, Sarah Bogdanovitch et Emily Jarvis –, ainsi que deux étudiantes au programme de recherche avec mémoire – Ying Ying Liu et Dahlia Thompson – participaient à ce séminaire. Ensemble, elles ont cherché des réponses à ces questions, d’abord en réalisant une revue de littérature, puis en résumant leurs résultats dans une série de billets de blogue (www.digitalmediaprojectforchildren.worpress.com).

Que disent les études scientifiques?

Il semblerait que de nombreux facteurs contribuent à créer un fossé entre les sexes. L’écart commence à se créer avant même que les enfants, garçons et filles, atteignent les premiers stades de l’alphabétisation. Ainsi, avant même de recevoir une éducation formelle à la lecture et à l’écriture, les fillettes semblent déjà être avantagées. Cet avantage est particulièrement notable en ce qui concerne les aptitudes enseignées, comme la reconnaissance des lettres et l’association des lettres à des sons, qui sont importantes pour l’apprentissage de la lecture. De plus, la lecture exige la coordination de processus mentaux supérieurs; or, des études ont démontré que ces processus, appelés fonctions exécutives, se développent plus lentement chez les garçons. L’autocontrôle, qui en fait partie, est important pour suivre des instructions et se consacrer de façon autonome à des activités de lecture en classe. Enfin, la motivation et les idées reçues pourraient également contribuer à creuser l’écart entre les sexes. Les croyances selon lesquelles les filles réussissent mieux dans les domaines associés aux langues et les garçons, dans les domaines relevant des mathématiques, peuvent avoir une influence sur l’image que les enfants se font d’eux-mêmes. De telles perceptions peuvent favoriser en quelque sorte un échec annoncé, c’est-à-dire que les garçons croient que d’emblée, les filles sont meilleures pour exécuter certaines tâches comme lire, ce qui nuit à leurs propres résultats. Cependant, nous ne connaissons pas encore tout ce qui explique ce fossé entre les sexes. Il faudra davantage de recherches pour comprendre pourquoi il existe un tel écart dans les habiletés de lecture des garçons et des filles et ce que nous pouvons faire pour éviter que le phénomène se perpétue.

L’ÉSCH à la rescousse!

En attendant que la science trouve des solutions, pas de panique. L’équipe de l’ÉSCH a élaboré des conseils et des recommandations à l’intention des enseignants, des parents et des orthophonistes, afin d’améliorer les habiletés de lecture des garçons et de combler l’écart. Il faut mentionner que cette liste n’est absolument pas exhaustive et que l’étude, toujours en cours, n’est pas encore concluante.

Voici donc quelques conseils et recommandations pour les parents de la part de l’équipe de recherche :

  1. Les parents sont invités à lire avec leurs tout-petits en utilisant des méthodes interactives et collaboratives.
  2. Ils sont également invités à se laisser guider par les intérêts de leurs enfants et à les renforcer.
  3. Il existe de nombreux programmes et ressources communautaires qui aident les parents à accompagner leurs enfants dans l’apprentissage de la lecture. Non seulement ces programmes sont-ils des occasions d’apprentissage pour les parents, mais ce sont aussi des occasions d’interagir et de s’entraider entre adultes. Par exemple, l’organisme Literacy Quebec permet aux parents québécois d’accéder à des services de tutorat bilingue, à des outils, à des activités de lecture et à d’autres services d’alphabétisation. (Pour en savoir plus, consultez le site www.literacyquebec.org.)

Voici maintenant des conseils et des recommandations pour le personnel enseignant :

  1. Comme nous l’avons déjà mentionné, il est important de prendre conscience de nos propres idées préconçues au sujet des sexes. Les enseignants sont encouragés à créer des espaces de lecture qui sont conviviaux pour tous les enfants, sans supposer que certains livres ou sujets intéresseront particulièrement les garçons ou les filles.
  2. Dans une classe, les enfants devraient avoir accès à un grand choix d’ouvrages : fictions, documentaires, bandes dessinées et magazines. Devant un vaste éventail de genres et de sujets, les enfants pourront explorer et découvrir quels sont leurs intérêts. Il est important de ne pas oublier d’encourager les enfants à faire leurs propres choix et d’approuver ces choix, afin qu’ils gardent une impression positive de la lecture.
  3. Les enseignants sont encouragés à entretenir la motivation intrinsèque des élèves à lire (plutôt que de les inciter à lire seulement pour obtenir des récompenses, ou pour d’autres facteurs extrinsèques). C’est une bonne idée de favoriser l’autonomie et de féliciter les élèves qui s’attaquent à des lectures plus difficiles plutôt que d’enchaîner les petites lectures faciles.

Enfin, voici des conseils et des recommandations pour les orthophonistes :

  1. Les enfants qui ont de la difficulté à lire peuvent bénéficier de séances individuelles, avec activités de conscience phonologique et de compréhension de lecture. Cette méthode n’exige pas la présence d’un orthophoniste et son efficacité avec des bénévoles adultes a été démontrée.
  2. En lisant avec des enfants, la stratégie de verbalisation (« réfléchir à voix haute ») est utile. Cette technique consiste à verbaliser les stratégies de compréhension pour montrer à l’enfant comment les utiliser. Les orthophonistes peuvent apprendre cette technique aux enseignants, afin d’étendre ses répercussions et de toucher un plus grand nombre d’enfants.
  3. Les problèmes de lecture sont souvent causés par des déficits langagiers sous-jacents. Les orthophonistes peuvent favoriser le développement d’aptitudes langagières solides qui serviront de fondations pour l’amélioration des compétences en lecture – en particulier grâce à des activités orales en groupe au niveau préscolaire, axées sur le vocabulaire, la compréhension et les récits.

Un fossé à combler entre les scientifiques et la population.

Ce séminaire constituait une occasion unique pour les étudiantes de s’exercer non seulement à répondre à des questions de recherche, mais aussi à diffuser de l’information et à créer des ressources. Sarah Bogdanovitch, l’une des participantes, explique que « la revue de littérature était un élément important du projet, mais nous étions toutes déterminées à créer une ressource qui serait vraiment utile aux éducateurs, aux parents et aux orthophonistes en dehors de la communauté scientifique. D’un côté, notre projet portait sur la question de recherche à laquelle nous voulions répondre, mais d’un autre côté, il servait aussi à nous apprendre à adapter les résultats nos recherches pour la population. »

Sur la photo (de gauche à droite): Rebecca Nishimura, Ying Ying Liu, Sarah Bogdanovitch, Emily Jarvis, Hope Anderson, Dahlia Thompson Forrester

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