Aurélie Derigaud-Choquette - Faculté de droit

Aswat Nissa (qui signifie « Voix des Femmes » en arabe) encourage les femmes à prendre leur place au sein de la société tunisienne. Cette organisation, créée suite à la chute du régime dictatorial de Ben Ali en 2011, joue aujourd’hui un rôle important au sein de la société civile tunisienne. Cette organisation lutte contre la discrimination basée sur le genre et pour l’intégration de l’approche genre dans les politiques publiques tunisiennes. Elle accompagne et forme aussi les candidates tunisiennes aux élections du pays (que ce soit municipales ou législatives) en leur partageant des compétences et des connaissances, et en appuyant leur leadership. Rapidement, les membres de l’ONG m’ont accueillie au sein de l’équipe en m’encourageant à lire de nombreux rapports et analyses produits par l’organisation. J’ai aussi rapidement mis la main à la pâte pour participer à l’écriture, la correction et la traduction des documents produits par Aswat Nissa.

Avec ma collègue Maissa et l'étude sur l'intégration du genre
Ainsi, deux semaines après mon arrivée, j’ai assisté à la table ronde organisée par Aswat Nissa pour la présentation de son étude sur l’intégration de l’approche genre dans la législation tunisienne relative au secteur de la sécurité entre 2014 et 2018. Ce rapport analyse comment les législations étudiées adoptent une approche genre (le “genre” y étant défini de manière large), c’est-à-dire à quel point la loi prend en compte toutes les tranches de la société (que ce soit les femmes, les personnes âgées ou les LBTQI++). En effet, comme l’indique l’étude, même si une loi ne crée pas de discrimination directement, elle n’inclue souvent pas certaines dispositions législatives qui permettraient de prendre en compte (comme il se doit) les différentes populations marginalisées de la société. Ainsi, l’objectif est de favoriser une égalité réelle (et non seulement une égalité formelle).

Comme mentionné par les auditeurs de la table ronde, malheureusement, même si ces changements législatifs étaient faits, les protections légales ne sont pas une solution miracle. En effet, par la Constitution tunisienne adoptée en 2014, l’égalité entre les hommes et les femmes est déjà formellement reconnue.  Par exemple, à l’article 46 de la Constitution de la République tunisienne, on peut lire à l’alinéa 2 « l’État garantit l’égalité des chances entre l’homme et la femme pour l’accès aux diverses responsabilités et dans tous les domaines ». Cependant, le manque d’allocation budgétaire pour mettre en œuvre la Constitution (et les lois qui en découlent) est un frein important à une réelle égalité homme-femme.

Image by Aurélie Derigaud-Choquette.
Dans le centre-ville de ma nouvelle ville d'adoption, Tunis
Ce genre de distorsion entre les protections législatives et la réalité s’illustre pour moi par les actes de harcèlement de rue trop fréquents en Tunisie, et aussi de violence de rue (heureusement que je n’ai pas vécue), alors même que le pays a adopté une loi en 2017 pour contrer la violence commise à l’égard des femmes et les actes discriminatoires (Loi nº 58). Il reste donc du chemin à faire pour assurer la pleine sécurité des femmes, et cela passe surtout par un changement des mentalités de la société. Je me suis ainsi vu rappeler que les changements législatifs ne servent à rien s’ils ne sont pas accompagnés d’une mise en œuvre efficace et d’un changement sociétal. Quelque chose qu’on peut facilement oublier en étudiant dans une faculté de droit!

Merci à David W. Binet, Francine et Robert Wiseman, et à Joseph Schull et Anna Yang pour leur généreux soutien à mon expérience Tunisienne. 

Aswat Nissa ou La voix des femmes, par Aurélie Derigaud-Choquette

Appelée à défendre la cause des femmes et des populations marginalisées en Tunisie, Aswat Nissa mène son combat sur plusieurs fronts :
Soutenir et former les candidates aux élections, une mission!
Web, Facebook, Twitter, Instagram, radio, presse écrite: tous les moyens sont bons pour sensibiliser au manque de représentation des femmes en politique ou à la violence faite aux femmes.
Analyser et étudier les progrès accomplis pour l’intégration de l’approche genre dans les politiques publiques, quoi de mieux pour en relever les lacunes et appeler au changement?
Tunisiennes et tunisiens sur un pied d’égalité, un idéal atteignable!

 

Nourrie et éveillée à la cause féminine par mon implication au sein de cette équipe motivée,
Ici et maintenant, mes efforts contribuent au changement à l’échelle locale, malgré l’adversité.
S‘aventurer dans des régions jusqu’alors inconnues du droit pour moi, et explorer les dessous du travail d’une organisation militante de la société civile.
S‘affirmer, apprendre, échanger, débattre, éveiller ma curiosité…
Aswat Nissa, je vous remercie de tant m’apprendre!

Back to top