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Grande avancée dans la lutte contre les espèces envahissantes dans les Grands Lacs

Une réglementation binationale des eaux de ballast a réduit les risques d’invasion de 85 % depuis 2008
Publié: 11 March 2022

Dans tous les écosystèmes côtiers de la planète, les eaux de ballast déversées par les navires transocéaniques ont introduit des centaines d’espèces envahissantes qui ont fortement perturbé les pêches et la biodiversité. Les mesures visant à limiter ces invasions aquatiques ont, dans l’ensemble, connu un succès mitigé. Cela dit, une étude récente indique qu’une réglementation binationale visant les navires qui entrent dans les Grands Lacs, en vigueur depuis le milieu des années 2000, aurait largement contribué à éliminer une grande partie des espèces envahissantes dans le plus grand écosystème d’eau douce du monde. Cette étude, parue récemment dans Conservation Letters, a été dirigée par Anthony Ricciardi (professeur de biologie au Musée Redpath et à l’École de l’environnement Bieler de l’Université McGill) et Hugh MacIsaac (professeur et titulaire d’une chaire de recherche du Canada à l’Institut de recherche environnementale des Grands Lacs de l’Université de Windsor).

« À ma connaissance, aucune autre invasion d’un grand système aquatique n’a été ralentie par une intervention des autorités décisionnelles, indique Anthony Ricciardi. De toute évidence, cette forme de protection est efficace. En Europe, par exemple, il existe un grand nombre d’espèces d’eau douce hautement envahissantes qui pourraient être introduites par les eaux de ballast et proliférer dans les Grands Lacs. Tout indique que cette réglementation empêche probablement leur introduction. »

L’écosystème d’eau douce le plus envahi de la planète

Aucun autre écosystème d’eau douce n’a été envahi aussi fréquemment ni aussi intensément que le bassin des Grands Lacs. Au cours des deux derniers siècles, près de 190 espèces non indigènes de poissons, d’invertébrés, de plantes, de plancton et de microbes ont établi des populations dans ce bassin. Au moins 65 % des envahisseurs recensés depuis l’ouverture de la voie maritime du Saint-Laurent, en 1959, ont été introduits dans les Grands Lacs par les eaux de ballast rejetées par des navires provenant de ports étrangers. Ces intrus redoutables, comme la moule zébrée, la moule quagga, le cladocère épineux et le gobie arrondi, ont un potentiel dévastateur pour la santé écologique du bassin et pour l’activité économique qui en dépend.

Selon les auteurs de l’étude, de 1959 jusqu’au milieu des années 2000, on découvrait un nouvel envahisseur tous les 6 ou 7 mois dans les Grands Lacs.

En réponse à ces assauts incessants, le Canada et les États-Unis ont décidé d’harmoniser leur réglementation et d’exiger que les citernes de ballast soient rincées à l’eau salée en haute mer, avant que les navires pénètrent dans la voie maritime du Saint-Laurent pour se rendre aux Grands Lacs.

« Des expériences ont démontré que le rinçage à l’eau salée contribuait à réduire grandement la quantité et la variété d’organismes d’eau douce dans les citernes de ballast », explique Hugh MacIsaac.

Des données empiriques révèlent une diminution marquée du risque d’invasion

C’est en observant le taux d’invasion qu’on peut vraiment évaluer l’efficacité d’une telle réglementation. Depuis 2008, les invasions signalées dans le bassin des Grands Lacs ont diminué de 85 %; elles sont actuellement à leur niveau le plus bas depuis deux cents ans. D’autres facteurs peuvent avoir contribué à ce déclin marqué, mais les données empiriques indiquent que la réglementation des eaux de ballast en serait la cause principale.

 

Les Grands Lacs demeurent vulnérables aux invasions attribuables à des activités mal réglementées, comme le commerce des organismes vivants (animaux d’aquarium, appâts vivants, plantes de jardin ornementales, marchés d’alimentation), mais cette étude attire l’attention sur les avantages potentiels d’une stratégie internationale fondée sur des données probantes.

L'étude

L’article « Vector control reduces the rate of species invasion in the world’s largest freshwater ecosystem », par Anthony Ricciardi et Hugh MacIsaac, a été publié dans Conservation Letters.

DOI : https://doi.org/10.1111/conl.12866


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