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Une découverte fortuite permet de sauver une vie

Publié: 11 May 2011

Une équipe de chercheurs de McGill décèle deux mutations pathogènes distinctes permettant de sauver la vie d'un nourrisson

Il y a environ deux ans, le Pr Philippe Gros, professeur au Département de biochimie de l'Université McGill et chercheur responsable au Complexe des sciences de la vie, rapportait qu'une souris mutante était immunodéprimée et hypersensible aux vaccins contre le bacille de Calmette-Guérin (BCG) et la tuberculose. Dans ce modèle, l'équipe du Pr Gros avait découvert que l'immunodéficience était causée par une mutation de la protéine régulatrice du système immunitaire appelée IRF8.

Informé de ces recherches, un médecin de Newcastle communique un an plus tard avec le Pr Gros au sujet de l'une de ses patientes âgée d'à peine trois mois et très gravement malade. Le bébé souffrait d'une infection par le vaccin BCG périnatal. Malgré l'administration d'un traitement-choc aux antibiotiques, ses symptômes d'infection réapparaissaient. De plus, aucune cellule monocytaire ou dendritique, deux types de cellules immunitaires vitales, ne circulait dans son sang. L'enfant avait été admise aux soins intensifs, et rien ne laissait présager qu'elle pourrait être sauvée.

Les aspects cliniques de l'immunodéficience du nourrisson étaient à ce point semblables aux conclusions du modèle murin du Pr Gros, que l'équipe de chercheurs a tenté de trouver des mutations dans le gène IRF8 de cette très jeune patiente. Le groupe du Pr Gros a aussi examiné le gène IRF8 dans d'autres cas cliniques d'infection disséminée par le vaccin BCG.

Les chercheurs ont découvert deux mutations pathogènes distinctes : l'une causant une réaction grave comme celle du bébé (maladie autosomique récessive) nécessitant une transplantation de cellules souches, l'autre causant une maladie bénigne (maladie autosomique dominante).

Cette découverte, publiée récemment dans le New England Journal of Medicine, indique que le rôle du gène IRF8 serait essentiel au développement et au fonctionnement des cellules monocytaires et dendritiques, de même qu'à la protection contre les infections mycobactériennes comme la tuberculose humaine.

Le Pr Gros affirme cependant que le plus beau dans cette histoire, c'est que le nourrisson a pu bénéficier d'une transplantation de cellules souches qui lui a permis de guérir. En se fondant sur les recherches de l'équipe, ses médecins s'apprêtaient à procéder à la transplantation de cellules de l'un des parents, lesquelles étaient parfaitement compatibles. Cependant, lorsque l'équipe a appris que le père du bébé était porteur d'une copie du gène dysfonctionnel, et qu'un tel cas est délétère chez les souris, les médecins ont préféré opter pour la cellule d'un donneur étranger.

« Cet exemple représente bien la filière de découverte que le Laboratoire de recherche sur les traits complexes de McGill tente d'instaurer », explique le Pr Gros. « Ce qui avait commencé par une recherche fondamentale a donné lieu à des découvertes génétiques sur des modèles murins, validées chez l'humain par la suite et finalement traduites en résultats cliniques positifs. »

« Il s'agit d'un archétype de recherche translationnelle », affirme le Dr Richard I. Levin, vice-principal à la santé et aux affaires médicales et doyen de la Faculté de médecine de l'Université McGill. « Lorsque les résultats des recherches menées dans les laboratoires du Complexe des sciences de la vie peuvent être partagés à l'autre bout du monde à temps pour sauver la vie d'un enfant, nous constatons que notre objectif est atteint. »

Parmi les autres chercheurs ayant participé à cette étude, mentionnons la doctorante Sandra Salem, le Pr Albert Berghuis et la chercheuse Anny Fortin. L'étude a pu être réalisée grâce à la précieuse collaboration de scientifiques et cliniciens de l'Université Rockefeller de New York, de l'Hôpital Necker de Paris ainsi que de l'Université Newcastle et du King's College de Londres.

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