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L’hormone de la faim rend la nourriture plus attrayante

Publié: 6 May 2008

Une nouvelle étude d’imagerie cérébrale menée à l’Institut neurologique de Montréal, de l’Université McGill, révèle que la ghréline – une hormone sécrétée par l’estomac – agit sur des régions spécifiques du cerveau pour stimuler notre réaction aux signaux liés à la nourriture et au fait de manger par plaisir. L’étude, publiée dans l’édition du 7 mai de Cell Metabolism, est cruciale pour faire avancer la compréhension et le traitement de l’obésité, un état qui touche des milliers de personnes dans le monde entier.

On pensait jusqu’ici que l’appétit était contrôlé par deux mécanismes distincts : l’alimentation homéostatique et non homéostatique ou hédonique. L’alimentation homéostatique est contrôlée par des hormones comme la ghréline, qui agissent sur le cerveau pour indiquer au corps quand manger afin de maintenir un poids corporel constant. L’alimentation hédonique est déclenchée par des signaux visuels ou olfactifs. Par exemple, vouloir manger un morceau de gâteau juste parce qu’il a l’air savoureux et qu’en manger sera agréable. L’étude démontre aussi que les deux comportements de consommation sont interreliés et que la ghréline, hormone de l’estomac, joue un rôle clé dans leur régulation.

« Notre étude montre que la ghréline rend bel et bien certaines régions du cerveau plus sensibles aux signaux alimentaires visuels, stimulant ainsi les réactions hédoniques et incitatives à des signaux liés à la nourriture », explique Dr Alain Dagher, neurologue à l’Institut neurologique de Montréal, de l’Université McGill, et chercheur principal de l’étude. « La ghréline est une hormone qui déclenche la faim et qui est sécrétée par l’estomac [lorsqu’il est vide]. L’analogie la plus simple serait de penser aux fois où vous allez faire des courses l’estomac vide et que vous avez tendance à acheter plus d’aliments et de produits riches en calories. C’est parce que votre cerveau juge la nourriture plus attirante, en grande partie à l’action de la ghréline sur le cerveau. »

L’étude soutient la thèse voulant qu’il faille considérer l’obésité comme une maladie du cerveau et la faim comme une sorte de dépendance alimentaire. Les personnes obèses pourraient trop manger dans une large mesure en raison d’une faim excessive. Le Dr Dagher et ses collègues ont découvert que la ghréline travaille sur des régions du cerveau reconnues pour être associées à la satisfaction et à la motivation, les mêmes régions intervenant dans les toxicomanies – le corps amygdalien, l’insula, le cortex orbitofrontal (COF) et le néostriatum. « Ces régions travaillent ensemble pour attribuer une valeur incitative aux objets du monde et aux actions, et exercent un contrôle très puissant sur nos comportements. Elles sont toutes des cibles des drogues engendrant une dépendance (comme la cocaïne et la nicotine) et sont aussi des cibles des signaux d’alimentation comme la ghréline », explique le Dr Dagher.

On montrait aux participants à l’étude des images d’aliments et de paysages [à titre de contrôle] avant et après avoir reçu de la ghréline par voie intraveineuse pendant une tomographie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf). Outre d’analyser l’activation de différentes régions du cerveau, les sujets devaient aussi répondre à des questions concernant leur humeur et leur appétit avant et après avoir vu les jeux d’images. Les effets de la ghréline sur le corps amygdalien et le COF avaient un rapport avec l’évaluation faite par chaque personne de sa faim.

L’étude montre que l’action de la ghréline est plus complexe qu’on le pensait auparavant et fait mieux comprendre comment un traitement aux médicaments pourrait servir à combattre l’obésité. Cette recherche pourrait également éclairer les politiques d’intérêt public. Si l’on considère les aliments comme pouvant engendrer une dépendance, cela pourrait appuyer les mesures visant à limiter ou à bannir le prêt-à-manger des écoles et les publicités sur la malbouffe destinées aux enfants, tout comme les résultats prouvant que la nicotine est toxicomanogène ont orienté les politiques publiques actuelles concernant la nicotine.

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