Nouvelles

Identification d’une nouvelle souche de parasite

La recherche sur les trichocéphales a une incidence sur la santé humaine et la conservation des animaux

 

Publié: 12 January 2015
Environ 600 millions de personnes sont infestées par les trichocéphales dans le monde. La plupart sont des enfants qui vivent dans des pays défavorisés et dont le développement physique et mental est freiné par la présence de ces parasites gastro-intestinaux. Les trichocéphales nuisent à leur aptitude à apprendre et, par conséquent, ont une incidence à long terme sur la situation sociale et économique de certaines des populations les plus démunies du monde. Bien que l’espèce Trichuris trichiura infeste à la fois les primates non humains et les humains, on sait relativement peu de choses sur ce parasite. Ainsi, jusqu’à la publication des résultats d’une récente étude réalisée par Ria Ghai, doctorante en biologie à l’Université McGill, les scientifiques croyaient qu’une seule espèce de trichocéphales pouvait infecter à la fois les primates et les humains. Mais la chercheuse a découvert l’existence de trois groupes génétiquement distincts de trichocéphales – et un seul d’entre eux semble pouvoir se transmettre entre les humains et les primates non humains. Une telle découverte est particulièrement importante pour les spécialistes de la santé publique partout dans le monde.

 

Les travaux de Ria Ghai, qui ont fait l’objet d’un article publié récemment dans la revue PLOS Neglected Tropical Diseases, ont été réalisés dans la forêt tropicale humide du Parc national de Kibale, dans le sud-ouest de l’Ouganda, qui compte l’une des plus importantes populations de primates dans le monde. Les arbres abritent d’innombrables singes, dont des espèces en voie de disparition, comme le colobe rouge, le chimpanzé oriental et le rare cercopithèque de l’Hœst, ainsi que des espèces plus répandues, comme les babouins. Le parc, qui héberge 13 espèces de primates, est un milieu forestier insulaire au cœur de l’une des régions agricoles les plus densément peuplées de l’Afrique de l’Est puisqu’elle compte une population de 300 à 600 personnes au kilomètre carré, on observe donc une interaction croissante entre les deux groupes.

 

« Le parc est une aire protégée depuis 1993, mais les gens s’aventurent dans la forêt depuis très longtemps pour y trouver du bois pour la combustion, ainsi que des feuilles de bananier et des herbages qu’ils tissent pour en faire divers objets. Ils fréquentent également la forêt pour y chasser des animaux sauvages, et il est difficile de changer les habitudes de personnes aussi démunies », affirme Ria Ghai. « Les singes sortent également du parc pour piller les champs de maïs et de patates douces. Or, dans ces régions où les populations n’ont pas accès à suffisamment d’eau potable pour le lavage des mains ou des aliments et où ils se déplacent pieds nus partout, il n’est pas surprenant que les échanges de matières fécales entre humains et primates aient favorisé la transmission bidirectionnelle des trichocéphales. »

 

Bien que les chercheurs et les professionnels de la santé connaissent l’existence des trichocéphales depuis longtemps, ils n’avaient accordé jusqu’à maintenant que peu d’attention à la transmission de ce parasite entre les primates et les humains. L’analyse moléculaire des matières fécales de diverses espèces, dont les humains, réalisée par Ria Ghai, suggère qu’il existe une souche de trichocéphales observée uniquement chez les humains, une autre souche observée uniquement chez les colobes noir et blanc ou rouges et, enfin, une troisième souche présente à la fois chez les humains et les primates.

 

« Ces découvertes prouvent que nous avions sous-estimé la biodiversité », affirme Colin Chapman, coauteur de l’étude et professeur au Département d’anthropologie et à l’École de l’environnement de l’Université McGill, qui travaille dans cette région depuis de nombreuses années. « Les espèces de parasites sont beaucoup plus nombreuses que nous l’avions cru, et nous espérons que ces nouvelles données se révéleront utiles à la fois pour les écologistes et pour les responsables de l’élaboration de politiques en matière de santé. »

 

Version intégrale de l’article publié dans PLOS Neglected Tropical Diseases : http://www.plosntds.org/article/info%3Adoi%2F10.1371%2Fjournal.pntd.0003256

Back to top