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Nouveau test de dépistage de l’ADN du VPH : une étude révèle le peu d’avantages à dépister les femmes de 55 ans si leur résultat est négatif

Publié: 2 November 2018
  • Un dépistage régulier par cytologie (test Pap ou frottis) demeure la méthode de dépistage du VPH la plus utilisée et il peut prévenir les cancers jusqu’à l’âge de 75 ans, bien que les avantages diminuent avec l’âge.
  • Avec les nouveaux tests de dépistage de l’ADN du VPH (tests VPH), qui offrent un plus grand degré de précision, on a déterminé que les femmes de 55 ans dont le résultat est négatif présentaient peu de risque de développer un cancer du col de l’utérus.

Un seul résultat négatif au test de dépistage de l’ADN du virus du papillome humain (VPH) – un nouveau test qui peut détecter 14 souches de VPH à haut risque avec un grand degré de précision – obtenu à l’âge de 55 ans suggère qu’une femme présente peu de risque de développer un cancer du col de l’utérus et qu’il y a peu d’avantages à poursuivre le dépistage avec ce type de test.

Toutefois, dans le cas du dépistage par cytologie (aussi appelé test Pap ou frottis), qui est la méthode la plus utilisée et la moins chère, un dépistage régulier jusqu’à l’âge de 75 ans permet encore de prévenir certains cancers, même si les avantages diminuent avec l’âge. Ces observations sont tirées d’une nouvelle étude de modélisation publiée dans la revue The Lancet Oncology.

« Les cancers du col de l’utérus sont causés par des infections à différents types de VPH oncogènes. Nous utilisons depuis longtemps la cytologie pour détecter des lésions précancéreuses causées par le VPH, qui peuvent alors être traitées avant qu’elles évoluent en un cancer du col de l’utérus », explique Talia Malagon, boursière postdoctorale sous la supervision du Dr Eduardo Franco à la Faculté de médecine de l’Université McGill, et auteure principale de l’étude. « Même si le dépistage par cytologie a permis de réduire le nombre de femmes qui sont atteintes d’un cancer du col de l’utérus, on est loin de la perfection, parce que cette méthode ne détecte pas toujours les lésions précancéreuses qui se transforment en cancer. Nous savons depuis un certain temps que la détection directe des types de VPH qui causent le cancer du col de l’utérus est tout aussi performante sinon plus que le dépistage par cytologie chez les femmes de moins de 60 ans. Ce que nous ignorions, c’est si une femme âgée qui a un résultat négatif au test VPH pouvait se passer d’un dépistage de façon aussi sûre qu’une femme âgée qui a un résultat négatif en cytologie. »

« Notre étude ne signifie pas nécessairement qu’il faut cesser tout dépistage à 55 ans, puisque les avantages de poursuivre le dépistage dépendent de la méthode utilisée. Dans les pays qui utilisent encore la cytologie, le dépistage à un âge plus avancé devrait encore réduire le risque de cancer du col de l’utérus, ajoute-t-elle. Cependant, nos résultats portent à croire que dans les pays qui utilisent les tests VPH, il serait possible de cesser le dépistage plus tôt que nous le faisons maintenant, si les femmes ont un résultat négatif au test VPH. Notre étude n’incluait pas d’analyse de coût-efficacité, une prochaine étape utile pour éclairer les décisions en matière de politiques avant de modifier les lignes directrices. »

Le vaccin contre le VPH peut contribuer grandement à réduire l’incidence du cancer du col de l’utérus à long terme, et des programmes de vaccination ont été mis en place dans de nombreux pays. Toutefois, les femmes âgées qui n’ont pas bénéficié de la vaccination devront encore compter sur un dépistage régulier pour prévenir le cancer du col de l’utérus [1].

L’incidence du cancer du col de l’utérus et la mortalité qui y est liée demeurent élevées chez les femmes âgées – par exemple, aux États-Unis, les femmes de 70 ans ou plus ont plus de risques de mourir d’un cancer du col de l’utérus (entre 5,3 et 6,5 pour 100 000 femmes) que les femmes de 40 à 44 ans (3,2 pour 100 000). De précédentes études ont montré que les femmes de plus de 65 ans qui se soumettent à un dépistage présentent un moins grand risque de cancer du col de l’utérus que les femmes qui ne font pas de dépistage; mais on n’a pas pu déterminer clairement si ce plus faible risque était l’effet résiduel du dépistage à un plus jeune âge.

Les principales lignes directrices recommandent de cesser le dépistage du cancer du col de l’utérus (tant par cytologie que tests VPH) vers 65 à 69 ans, mais on note un manque de données probantes de grande qualité pour étayer cette recommandation. De plus, peu d’études prennent en considération le taux d’hystérectomie chez les femmes âgées dans leurs estimations des risques.

Il existe deux types de tests de dépistage du cancer du col de l’utérus. La cytologie demeure la méthode la plus utilisée dans le monde, et elle est plus économique que les tests VPH. La cytologie peut détecter environ 55 % des cas de CIN2+ (lésions précancéreuses de haut grade). De nombreux pays adoptent désormais les tests VPH pour le dépistage [2], qui peuvent détecter environ 96 % des cas de CIN2+. La plus grande disponibilité des tests VPH signifie qu’ils pourraient remplacer la cytologie dans de nombreux pays, mais en raison de leur coût supérieur, ce sont les pays à revenu plus élevé qui sont plus susceptibles de les adopter.

L’équipe de recherche a utilisé un modèle mathématique pour estimer le risque que des femmes âgées qui n’ont pas été vaccinées développent un cancer du col de l’utérus au cours de leur vie. L’équipe a élaboré, étalonné et validé son modèle en se servant de données canadiennes sur la santé, incluant les taux d’incidence du cancer du col de l’utérus de Statistique Canada et la prévalence du VPH du programme de dépistage en Colombie-Britannique (données de plus de 200 000 femmes). Selon les données canadiennes, l’équipe a présumé que 42 % des femmes qui vivent jusqu’à 100 ans subiront une hystérectomie totale.

La progression du cancer a été divisée en sept stades : sans infection, infection transitoire, infection persistante, CIN1, CIN2, CIN3 et cancer du col de l’utérus. Les chercheurs ont prédit le risque à vie de cancer du col de l’utérus en présumant deux choses : un respect parfaitement fidèle des lignes directrices sur le dépistage (soit un dépistage tous les 3 ans) et une observance typique du dépistage du cancer du col de l’utérus (plus près de la fréquence à laquelle les femmes subissent un dépistage dans la vraie vie, soit plus de 3 ans pour de nombreuses femmes).

Le modèle prédisait que sans dépistage ou vaccination, 1 femme sur 45 recevrait un diagnostic de cancer du col de l’utérus au cours de sa vie. Une observance parfaite du dépistage par cytologie tous les 3 ans entre 25 et 69 ans a fait descendre le risque à vie de développer un cancer du col de l’utérus à 1 sur 532.

Dans le cas des femmes non vaccinées dont l’observance au dépistage par cytologie est typique, l’arrêt du dépistage à 55 ans était associé à un risque à vie de cancer du col de l’utérus de 1 sur 138, comparativement à 1 sur 160 si l’arrêt du dépistage se faisait à 70 ans. Même si repousser de 55 à 75 ans l’âge à laquelle les femmes cessent de subir un dépistage par cytologie permet de diminuer progressivement le risque de développer un cancer plus tard, les constatations suggèrent qu’une part importante de la réduction du risque est due au dépistage fait avant 55 ans.

Cependant, le risque résiduel à vie (risque estimé après l’âge du dernier dépistage) une fois qu’une femme ne fait plus de dépistage dépend du type de dépistage utilisé. Pour les femmes non vaccinées qui cessent le dépistage à 55 ans avec un test VPH négatif, on estimait le risque résiduel de cancer du col de l’utérus à 1 sur 1940 (

De même, le risque résiduel à vie à l’âge de 70 ans était de 1 sur 1206 pour les femmes qui avaient eu un résultat négatif au test de cytologie, mais encore plus faible (1 sur 6525) avec un résultat négatif au test VPH. Un résultat négatif aux deux tests – cytologie et VPH – à 70 ans a été associé à un risque résiduel à vie de 1 sur 9550.

Les auteurs soulignent que leurs résultats pourraient ne pas s’appliquer aux futures cohortes qui présenteront une couverture vaccinale élevée ou qui auront été dépistées par des tests VPH presque toute leur vie. Cependant, comme il faudra des décennies avant que les cohortes vaccinées à l’adolescence atteignent 50 à 70 ans, les auteurs ajoutent que les résultats sont susceptibles de s’appliquer aux cohortes de femmes âgées pour les années à venir.

Les auteurs notent également que même si le test ADN du VPH est plus sensible que la cytologie pour détecter des types de VPH à haut risque, utilisé seul, il peut passer à côté de lésions causées par d’autres types de VPH oncogènes. Toutefois, les estimations laissent croire que les lésions qui ne sont pas détectées par le test ADN du VPH à 55 ans ont très peu de risque d’évoluer plus tard en cancer du col de l’utérus.

Cette étude a été financée par les Instituts de recherche en santé du Canada.

 http://www.thelancet.com/journals/lanonc/article/PIIS1470-2045(18)30536-9/fulltext

[1] La régularité du dépistage dépend du pays. Par exemple, le dépistage se fait aux 3 ans au Canada et aux États-Unis, mais aux 5 ans aux Pays-Bas.

[2] Le Royaume-Uni utilise encore la cytologie. Aux États-Unis, la cytologie et le test VPH sont disponibles et utilisés tous les deux. La cytologie est encore utilisée au Canada, mais des projets pilotes sont en cours pour la mise en œuvre du test VPH. Les pays importants qui ont adopté exclusivement le test VPH sont les Pays-Bas et l’Australie.

 

Source: Lancet Oncology

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