Juin, mois de la sensibilisation aux lésions cérébrales
Il reste encore beaucoup à faire pour améliorer le diagnostic et les traitements
Lorsque Sidney Crosby, joueur étoile de la LNH, a souffert d’une commotion cérébrale en mai ‒ sa quatrième en carrière –, la nouvelle a vite fait les manchettes partout au pays. Quelques années plus tôt, une commotion cérébrale avait tenu le célèbre joueur des Penguins de Pittsburgh à l’écart du jeu pendant dix mois.
Les commotions cérébrales peuvent laisser de graves séquelles, même lorsque la personne qui en est victime présente peu de symptômes immédiatement après le choc. Bien souvent, les victimes minimisent l’importance d’un léger coup à la tête, ignorant que le tissu cérébral est déjà endommagé.
En 2009, l’actrice hollywoodienne Natasha Richardson, qui avait encaissé un léger choc à la tête après avoir fait une chute alors qu’elle skiait à Tremblant, a ignoré l’avis des patrouilleurs, qui lui avaient suggéré de consulter immédiatement un médecin ‒ peut-être en raison d’une altération de son jugement. Deux heures plus tard, elle montrait des signes de traumatisme crânien. Elle a succombé à une hémorragie cérébrale deux jours après sa chute.
L’incidence des commotions cérébrales et des lésions cérébrales traumatiques chez les jeunes et les enfants est alarmante. Chaque année, environ 160 000 Canadiens subissent des lésions cérébrales, et le tiers de ces blessures surviennent chez des jeunes et des enfants, souvent lorsqu’ils pratiquent un sport ou participent à une activité récréative.
En 2014, une jeune Ontarienne de 17 ans, Rowan Stringer, a été plaquée pendant un match de rugby et s’est frappée la tête. Par la suite, elle a souffert de maux de tête et présenté d’autres symptômes, mais a ignoré ces signaux d’alarme, car elle voulait disputer un match important quatre jours plus tard. Pendant cette partie, elle a subi un autre choc à la tête. Elle est décédée des suites du « syndrome du second impact », lequel survient lorsqu'une personne subit un coup à la tête avant la disparition des symptômes d'une commotion cérébrale récente.
Les chutes constituent également une cause fréquente de commotions cérébrales, particulièrement chez les enfants et les personnes âgées.
Améliorer le diagnostic et le traitement des commotions cérébrales
Malheureusement, les méthodes de diagnostic et de traitement des commotions cérébrales sont loin d’être au point.
Alain Ptito, Ph. D., neuropsychologue au Neuro et directeur du Département de psychologie du Centre universitaire de santé McGill, s’est donné pour mission d’améliorer le diagnostic et le traitement des traumatismes crâniens.
« Le diagnostic posé par un médecin repose sur les renseignements donnés par le patient et demeure trop subjectif », affirme le Pr Ptito. « Et il n’existe pour ainsi dire aucun moyen de soigner les lésions causées par une commotion cérébrale. »
Au cours des dernières années, le Pr Ptito a eu recours à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle afin de créer une banque d’images cérébrales obtenues chez quelque 120 adultes et 70 enfants sains. Cette banque compte également des images cérébrales provenant de plus de 100 victimes de traumatismes crâniens, dont certaines étaient des athlètes professionnels.
« Nous pouvons ainsi examiner le schéma d’activation cérébrale d’une personne chez laquelle on soupçonne une commotion cérébrale et le comparer à celui de sujets sains appartenant au même groupe d’âge afin de déterminer s’ils sont similaires. »
Le Pr Ptito a communiqué avec des équipes de sport professionnel, comme celles de la LNH, afin d’obtenir l’autorisation d’obtenir des images radiologiques du cerveau des athlètes avant le début de leur saison de compétition, l’objectif étant d’utiliser ces clichés de référence pour déceler tout changement au niveau du cerveau chez les athlètes victimes par la suite d’une commotion cérébrale.
Le Pr Ptito aimerait particulièrement réaliser de tels travaux chez un grand nombre de femmes.
« On trouve très peu de données sur les commotions cérébrales chez les femmes dans la littérature scientifique », affirme le Pr Ptito. « Il est possible que les femmes et les hommes réagissent différemment à ce type de blessures. Ainsi, les femmes se remettent plus lentement d’une commotion cérébrale, peut-être parce que leur cou est plus faible ou qu’elles sont plus fragiles en raison des changements hormonaux qui surviennent pendant la période prémenstruelle. Or, de telles hypothèses se doivent d’être étayées par des données probantes. Il serait donc très judicieux de réaliser des essais chez la femme; malheureusement, on accorde très peu de subventions pour la recherche sur les lésions cérébrales traumatiques en général, et chez la femme en particulier. »
Le dispositif PoNSMC
Le Neuro compte parmi les cinq établissements aux États-Unis et au Canada qui, depuis quelques années, mettent à l’essai un dispositif expérimental prometteur appelé « stimulateur portable de neuromodulation » ou PoNSMC, fabriqué par Helius et conçu pour le traitement des lésions causées par les commotions cérébrales. Le nom de ce dispositif rappelle le terme anglais pons, qui désigne la protubérance annulaire, structure très importante située dans la partie supérieure du tronc cérébral. Cette structure cérébrale participe au contrôle de la respiration, de l’ouïe, du goût et de l’équilibre, et facilite également la communication entre les différentes parties du cerveau.
Tenu dans la bouche, le dispositif émet une légère stimulation électrique qui se rend au cerveau en empruntant les nerfs de la langue; pendant ce traitement, le patient fait des exercices de physiothérapie.
« La langue est un organe très sensible. Lorsqu’elle reçoit des stimuli électriques, l’information est envoyée au tronc cérébral, particulièrement au niveau de la protubérance annulaire », explique le Pr Ptito. « L’information est ensuite distribuée dans l’ensemble du cerveau. Nous croyons qu’en stimulant la langue, nous pouvons du même coup stimuler la plasticité cérébrale dans l’espoir de régler certains problèmes associés aux lésions cérébrales, comme les pertes d’équilibre. »
Ce dispositif est également mis à l’essai auprès de patients atteints de la maladie de Parkinson ou de sclérose en plaques et qui présentent des troubles de l’équilibre.
Le rêve : une clinique pour les patients victimes de commotions cérébrales
En janvier 2017, un groupe d’athlètes canadiens de calibre mondial composé notamment d’Anthony Calvillo, ancien joueur étoile de la LCF, de Ken Dryden, membre du Temple de la renommée de la LNH, et de Mike Richter, joueur étoile de la LNH, ainsi que de Martin Bédard, d’Otis Grant, de Nicolas Boulay, de Tanner Marsh et de Bruno Heppell ont pris part à l’événement TÊTES HAUTES organisé par le Neuro afin de sensibiliser la population aux commotions cérébrales et de recueillir des fonds pour la recherche sur ce type de lésions.
L’objectif ultime du Dr Ptito serait de mettre sur pied au Neuro une clinique consacrée exclusivement aux commotions cérébrales. Cette clinique serait dotée d’un appareil d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle et de personnel spécialisé à la fois dans l’utilisation du dispositif PoNSMC et les traitements de physiothérapie conçus pour les victimes de commotions cérébrales.
Pour que ce rêve se réalise, il faudra disposer de ressources financières additionnelles pour la recherche sur ces lésions cérébrales invalidantes et leur traitement, qui ne reçoivent que depuis peu toute l’attention qu’ils méritent.
L’Institut et hôpital neurologiques de Montréal de l’Université McGill
L’Institut et hôpital neurologiques de Montréal – le Neuro – est un établissement de calibre mondial voué à la recherche sur le cerveau et aux soins neurologiques de pointe. Depuis sa création, en 1934, par le célèbre neurochirurgien Wilder Penfield, le Neuro est devenu le plus grand établissement de recherche et de soins cliniques spécialisé en neurosciences au Canada, et l’un des plus importants sur la scène internationale. L’intégration harmonieuse de la recherche, des soins aux patients et de la formation par les plus grands spécialistes du monde contribue à positionner le Neuro comme un centre d’excellence unique pour l’avancement des connaissances sur les troubles du système nerveux et leur traitement. En 2016, le Neuro est devenu le premier institut au monde à adopter sans réserve le concept de la science ouverte en créant l’Institut de science ouverte Tanenbaum. Institut de recherche et d’enseignement de l’Université McGill, l’Institut neurologique de Montréal s’inscrit dans la mission en neurosciences du Centre universitaire de santé McGill. Pour tout renseignement sur le Neuro, visitez le https://www.mcgill.ca/neuro/fr