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Des chercheurs au Canada sur la voie prometteuse d’un traitement contre la grippe ciblant une molécule lipidique

Publié: 22 May 2019

Chez de nombreuses personnes, le système immunitaire parvient à éliminer le virus de l’influenza de type A, couramment appelé grippe. Toutefois, dans certains cas, la réponse immunitaire au virus de la grippe devient incontrôlable et l’inflammation causée par nos propres cellules immunitaires entraîne des lésions importantes dans les poumons, conduisant à un taux de morbidité et de mortalité accru.

Comment pouvons-nous aider notre système immunitaire à équilibrer ses deux principales stratégies de défense, celle qui s’attaque aux pathogènes (résistance de l’hôte), et celle qui limite les dégâts causés à nos propres tissus (tolérance à la maladie)?

Une équipe de scientifiques à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) à Montréal, au Canada, s’est penchée sur cette question fondamentale et a identifié une cible permettant de « modérer » la réponse immunitaire hyperactive à l’infection au virus de la grippe. Ils viennent de publier une étude dans la revue Nature Microbiology qui identifie un nouveau rôle joué par un médiateur lipidique appelé LTB4 (leucotriène B4) dans les poumons. Ce lipide LTB4 a la capacité de réduire les dommages collatéraux aux tissus de nos propres réponses immunitaires et d’améliorer le taux de survie de l’hôte.

Cette découverte laisse entrevoir des implications cliniques prometteuses pour le traitement de la grippe d’ici les prochaines années.

« Le virus de la grippe ne constitue pas la seule menace; la réponse immunitaire de l’hôte est principalement responsable de la mise en péril de la survie de ce dernier, explique le premier auteur de l’étude, Erwan Pernet, qui est chercheur boursier postdoctoral dans le laboratoire du professeur Maziar Divangahi à l’IR-CUSM. Il s’avère par conséquent essentiel de comprendre les mécanismes de régulation qui maintiennent l’équilibre délicat entre l’immunité protectrice et l’immunité préjudiciable. »

Un « lipide » régulant la réponse immunitaire

Selon l’OMS, le virus de l'influenza représente un défi mondial en matière de santé publique. Chaque année, cette maladie touche un milliard de personnes, et on dénombre de 290 000 à 650 000 décès attribuables à des problèmes respiratoires liés à l’influenza.

La cause profonde des lésions pulmonaires attribuables à la grippe est liée à un sous-type de cellules immunitaires appelées macrophages dérivés de monocytes inflammatoires. Bien que le recrutement de ces macrophages sur le site de l’infection joue un rôle crucial dans la réduction de la réplication virale, l’accumulation non contrôlée de ce type de cellules est aussi responsable des lésions des tissus.

L’équipe du Pr Divangahi concentre ses activités sur de nouvelles formes d’immunothérapies ciblant le système immunitaire, en utilisant les médiateurs lipidiques de l’hôte, afin d’éliminer efficacement le virus ou de limiter les lésions des tissus. Dans cette étude, ils se sont essentiellement penchés sur le médiateur lipidique LTB4 ainsi que sur ses effets sur la réponse immunitaire à une infection par le virus de la grippe. Après avoir étudié des souris dépourvues de récepteur du LTB4, ils ont pu identifier un réseau de « mécanismes régulateurs maintenant l’équilibre délicat entre l’immunité protectrice et l’immunité préjudiciable », auxquels le Postdoctorant Erwan Pernet a précédemment fait référence.

« C’est la première fois que nous démontrons l’existence d’un sous-type de macrophages pulmonaires capables de produire ce lipide immunorégulateur LTB4 afin de réduire l’inflammation causée par une autre population de macrophages qui sont responsables des lésions des tissus pendant une infection au virus de la grippe », explique l’auteur principal de l’étude, le Pr Divangahi, qui est le directeur adjoint des laboratoires Meakins-Christie et du Programme de recherche translationnelle sur les maladies respiratoires (RESP) de l’IR‑CUSM, et professeur adjoint de médecine à l’Université McGill.

L’élément suivant revêt une importance particulière quant à une éventuelle application clinique; l’étude dont il est ici question fait ressortir le fait que l’administration d’une dose unique de LTB4 lorsque la maladie a atteint son point culminant est suffisante pour réduire de manière importante l’immunopathologie et les lésions aux tissus pulmonaires, de même que pour améliorer le taux de survie de l’hôte.

À la lumière de ce travail, le professeur Divangahi et ses collègues considèrent que, « compte tenu de l’accessibilité d’une grande variété de médicaments ciblant le métabolisme lipidique (p. ex. : aspirine), qui sont déjà approuvés et utilisés chez l’humain pour contrôler les symptômes d’infection ou d’autres maladies auto-immunes comme l’asthme, les nouvelles stratégies en matière d’immunothérapie ciblant des médiateurs lipidiques spécifiques de l’hôte présentent un fort potentiel de translation clinique pour le traitement de l’influenza et possiblement pour d’autres infections virales. »


 

À propos de l’étude

"Leukotriene B4–type I interferon axis regulates macrophage-mediated disease tolerance to influenza infection" a été publiée par Erwan Pernet, Jeffrey Downey, Donald C. Vinh, William S. Powell et Maziar Divangahi dans Nature Microbiology

Ce travail a été rendu possible grâce au programme de subventions Fondation des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Le Pr Maziar Divangahi est financé par le Fonds de Recherche du Québec–Santé et la chaire Strauss en maladies respiratoires et Erwan Pernet est financé par le Fonds de recherche du Québec – Santé.

À propos de l’IR-CUSM

L’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) est un centre de recherche de réputation mondiale dans le domaine des sciences biomédicales et de la santé. Établi à Montréal, au Canada, l’Institut, qui est affilié à la faculté de médecine de l’Université McGill, est l’organe de recherche du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) – dont le mandat consiste à se concentrer sur les soins complexes au sein de sa communauté. L’IR-CUSM compte plus de 420 chercheurs et près de 1 200 étudiants et stagiaires qui se consacrent à divers secteurs de la recherche fondamentale, de la recherche clinique et de la recherche en santé évaluative aux sites Glen et à l’Hôpital général de Montréal du CUSM. Ses installations de recherche offrent un environnement multidisciplinaire dynamique qui favorise la collaboration entre chercheurs et tire profit des découvertes destinées à améliorer la santé des patients tout au long de leur vie. L’IR-CUSM est soutenu en partie par le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS). ircusm.ca

À propos de l’Université McGill

Fondée à Montréal (Québec) en 1821, McGill est le principal établissement d’enseignement postsecondaire au Canada. Il compte deux campus, 11 facultés, 11 écoles professionnelles, 300 programmes d’études et plus de 37 000 étudiants, dont 8 300 étudiants diplômés. McGill attire des étudiants de plus de 150 pays à travers le monde, avec plus de 7 200 étudiants internationaux représentant 20 % du corps étudiant. Près de la moitié des étudiants de McGill ont une première langue autre que l’anglais comme langue maternelle, dont plus de 6 200 francophones. mcgill.ca

 

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