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John O’Keefe remporte le prix Nobel de médecine

Quatrième ancien étudiant de l’Université McGill à gagner un prix Nobel depuis 2009
Publié: 7 October 2014

L'ancien élève de l’Université McGill, John O´Keefe, a remporté avec d’autres chercheurs le prix Nobel de médecine 2014 pour ses contributions à la découverte de cellules qui forment le « GPS interne » du cerveau nous permettant de nous orienter dans l’espace.

John O’Keefe, qui a obtenu son doctorat en psychophysiologie à l’Université McGill en 1967, dirige actuellement le Sainsbury Wellcome Centre in Neural Circuits and Behaviour à l’University College London (UCL). Les autres lauréats du prix Nobel de physiologie ou médecine sont May-Britt Moser et Edvard I. Moser, qui travaillent tous deux dans des instituts scientifiques situés dans la ville de Trondheim, en Norvège.

« La découverte du système de positionnement du cerveau représente un changement de paradigme dans notre compréhension de la manière dont les ensembles de cellules spécialisés collaborent pour exécuter des fonctions cognitives supérieures. Cette découverte a ouvert de nouvelles avenues pour comprendre d’autres processus cognitifs tels que la mémoire, la pensée et la planification », a expliqué le représentant de l’organisation des prix Nobel.

John O’Keefe est le dixième diplômé ou professeur de l’Université McGill à remporter un prix Nobel – et le quatrième ancien élève de l’Université depuis 2009. « La force durable de l’Université McGill repose sur la qualité de nos étudiants, a déclaré le doyen de la Faculté des sciences, M. Martin Grant. Au nom de nos étudiants, de nos professeurs et des membres de notre personnel de soutien, je peux affirmer que c’est ce qui nous rend fiers de travailler à l’Université McGill. »

« Nos sincères félicitations au professeur O’Keefe pour cette importante marque de reconnaissance à l’égard de ses travaux novateurs qui ont permis de faire progresser notre compréhension du cerveau », a indiqué Suzanne Fortier, principale et vice-chancelière de l’Université McGill. « Ce prix met de l’avant la contribution remarquable de notre institution dans le secteur des neurosciences. »

Les découvertes de M. O’Keefe et des Moser « ont répondu à des questions qui préoccupent les philosophes et les scientifiques depuis des siècles – comment le cerveau crée-t-il une carte de notre espace environnant et comment réussissons-nous à nous orienter dans un environnement complexe? » a déclaré le représentant de l’organisation des prix Nobel dans un communiqué de presse.

« En 1971, John O´Keefe a découvert la première composante de ce système de positionnement. Il a découvert qu’un type de neurone situé dans une zone du cerveau appelée l’hippocampe était activé en permanence lorsqu’un rat se trouvait à un certain endroit dans une pièce. D’autres cellules nerveuses étaient activées lorsque le rat changeait de place. John O´Keefe en a conclu que ces “cellules de lieu” formaient une carte de la pièce dans lequel se trouvait le rat. »

« Plus de trente ans plus tard, en 2005, May-Britt et Edvard Moser ont mis à jour une autre composante clé du système de positionnement du cerveau. Le couple a identifié un autre type de neurone, qu’il a appelé les “cellules de grille”, qui génèrent un système de coordonnées et permettent de se positionner de manière précise et de s’orienter. Les travaux subséquents de deux chercheurs ont montré la manière dont les cellules de lieu et les cellules de grille permettent de déterminer une position et de s’orienter. »

John O’Keefe, né en 1939 à New York, a obtenu son doctorat au Département de psychologie de l’Université McGill. Il possède la double nationalité américaine et britannique.

John O´Keefe, fasciné par la question des modes de contrôle des comportements par le cerveau, a décidé, à la fin des années 1960, de s’attaquer à cette question avec des méthodes de la neurophysiologie. En enregistrant les signaux de certains neurones situés dans une partie du cerveau appelée l’hippocampe chez des rats se déplaçant librement dans une pièce, John O’Keefe a découvert que certains neurones étaient activés lorsque l’animal occupait une place particulière dans l’environnement. M. O’Keefe a pu montrer que ces « cellules de lieu » n’enregistraient pas seulement des données visuelles, mais édifiaient une carte interne de l’environnement. John O’Keefe en a conclu que l’hippocampe génère de nombreuses cartes, représentées par l’activation collective des cellules de lieu dans différents environnements. Par conséquent, la mémoire d’un environnement peut être stockée en tant que combinaison particulière de l’activation des cellules de lieu dans l’hippocampe.

May-Britt et Edvard Moser dressaient la carte des connexions avec l’hippocampe chez des rats se déplaçant dans une pièce lorsqu’ils ont découvert un motif d’activation étonnant dans une partie voisine du cerveau appelée le cortex entorhinal. À cet endroit, certaines cellules étaient activées lorsque le rat passait d’un point à un autre dans un lieu organisé en une grille hexagonale. Chacune de ces cellules était activée selon un motif spatial unique et, collectivement, ces « cellules de grille » constituent un système de coordonnées qui permet de s’orienter dans l’espace. Avec les autres cellules du cortex entorhinal qui reconnaissent la direction des limites de la pièce, ces cellules forment des circuits avec les cellules de lieu dans l’hippocampe. Ce réseau de circuits constitue un système de positionnement complet, un GPS interne, dans le cerveau.

« De récentes études effectuées à l’aide des techniques d’imagerie cérébrale, ainsi que des études sur des patients subissant des neurochirurgies, ont permis de recueillir des éléments de preuve de l’existence de cellules de lieu et de cellules de grille chez les humains également », a expliqué le représentant de l’organisation des prix Nobel. Chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer, il arrive fréquemment que l’hippocampe et le cortex entorhinal soient touchés dès les premières étapes de la maladie, et souvent les personnes malades se perdent et n’arrivent plus à reconnaître leur environnement. Les connaissances sur le système de positionnement du cerveau pourraient, par conséquent, nous aider à comprendre le mécanisme qui est à la base de la perte de mémoire spatiale aux effets dévastateurs chez les personnes atteintes de cette maladie. »

Le mois dernier, John O’Keefe et Brenda Milner, professeure au Département de neurologie et de neurochirurgie de l’Université McGill, ont remporté le prix Kavli en neuroscience décerné tous les deux ans, avec leur confrère Marcus Raichle, professeur en radiologie, neurologie, anatomie et neurobiologie à la Washington University School of Medicine à St Louis. Les lauréats ont été reconnus pour « la découverte de réseaux cérébraux spécialisés pour la mémoire et la cognition ».

Dans une entrevue accordée à Nature Reviews Neuroscience sur les prix Kavli, John O’Keefe a déclaré qu’il avait eu beaucoup de chance d’obtenir une place de diplômé au sein du Département de psychologie de (Donald) Hebb à l’Université McGill, l’un des centres les plus importants de ce qu’on appelait à l’époque la « psychophysiologie ». Le terme « neuroscience n’avait pas encore été inventé ».

« Lorsque j’étudiais les amygdales dans le cadre de mon doctorat sous la direction de Ron Melzack, un grand nombre de mes collègues étudiants examinaient les effets des lésions hippocampiques sur le comportement des rongeurs. Nous étions tous convaincus par les travaux de Brenda Milner sur le patient H.M. (patient amnésique) que l’hippocampe jouait un rôle important dans la formation et le stockage de la mémoire, mais il était très difficile de produire un modèle animal des déficiences de la mémoire dont le patient souffrait. Lorsque j’ai décidé de revenir à l’étude du système limbique après mon programme de bourses postdoctorales à l’University College London (UCL), il m’a semblé que cette partie du cerveau méritait d’être approfondie. »

PHOTO: John O'Keefe (2014) Wikimedia Commons Per Henning/NTNU - https://www.flickr.com/photos/92416586@N05/15204259091

 

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