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La force secrète des moules de mer

Une découverte pourrait ouvrir la voie à des avancées médicales, notamment dans le secteur des implants biologiques et des capteurs portables.
Publié: 27 November 2023

Est-il possible de lier rapidement des tissus organiques et inorganiques? Les bio-ingénieurs tentent inlassablement de résoudre cette question dans le but d’élaborer des matériaux qui adhèrent les uns aux autres aux fins d’applications biomédicales de pointe.

Ayant tenté d’obtenir des réponses du côté de la nature, une équipe de l’Université McGill a mené des recherches sur le byssus de la moule marine, le pied fibreux au moyen duquel ce mollusque bivalve se cramponne aux bordures de l’océan. En effet, le byssus s’attache aux surfaces rocheuses au moyen d’une colle sous-marine, tout en demeurant solidement accroché aux tissus mous de la moule. C’est cette zone de contact entre les tissus organiques et la tige inorganique du byssus tige – l’interface biologique – qui est l’objet des travaux menés par Matthew Harrington, professeur de chimie à l’Université McGill et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en chimie verte.

« Nous n’avions jamais réussi à comprendre comment l’interface biologique de la tige du byssus peut exercer une force suffisante pour résister au déferlement constant des vagues, ni comment la moule peut décoller aussi rapidement son pied au besoin, explique le Pr Harrington. C’est comme si elle en maîtrisait la force, en quelque sorte. »

Une force étonnante et maîtrisée

Une recherche interdisciplinaire a permis à l’équipe de découvrir que la tige se sépare en environ 40 à 50 lamelles qui s’interdigitent avec le tissu vivant, créant ainsi une interface incroyablement forte, un peu comme si l’on intercalait deux bottins téléphoniques l’un dans l’autre.

« Le plus étonnant, c’est la façon dont la force d’adhérence peut être réduite grâce au mouvement par pulsation effectué par les milliards de minuscules cils qui se trouvent sur la surface du tissu organique. Ce mouvement est déterminé par la sérotonine et la dopamine des neurotransmetteurs, ce qui permet de libérer la tige au besoin », précise le Pr Harrington.

Cette découverte, particulièrement utile pour les ingénieurs médicaux et scientifiques des matériaux, pourrait s’avérer déterminante quant à l’avenir des implants biologiques, des capteurs portables, et des interfaces cerveau-machine, notamment.

« L’interface biologique de la tige du byssus ne ressemble à aucun matériau d’origine humaine. On pourrait s’en inspirer pour mettre au point nombre d’interfaces biologiques de prochaine génération, ajoute le Pr Harrington. Par ailleurs, étant donné qu’une conception novatrice des interfaces biologiques alimentera les avancées médicales, cette découverte pourrait avoir une incidence sur la santé humaine. »

L'étude

A strong quick-release biointerface in mussels mediated by serotonergic cilia-based adhesion par Matthew Harrington et al., a été publié dans Science. 

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